32 Malgaches pour 1 étranger
Vu la morosité actuelle au niveau de l’économie malgache, les dirigeants ont décidé de miser, entre autres, sur le tourisme pour rebondir. En effet, Madagascar étant un très beau pays, avec une biodiversité unique au monde et des paysages divers mais tous aussi fascinants, la venue des touristes semble être une évidence! Seulement, il y a quelques « détails » qui ont échappé à nos chers dirigeants!
Madagascar est une Île, et sauf pour quelques bateaux de croisière ou de marchandises, pour y aller il faut absolument prendre l’avion. Mais la destination est parmi les plus chères : il n’y a pas vraiment de concurrence et il n’y a pas encore de vol à bas coût (il faut compter au moins 800 à 900 euros pour un vol en période de basse saison! le prix d’un séjour tout compris avec le billet d’avion pour d’autres destinations). On a bien conduit des travaux, inaugurés à grande pompe, pour rénover l’aéroport international d’Ivato, près de la capitale et d’autres travaux seront conduits au niveau de l’aéroport de Nosy-Be (une île encore plus paradisiaque et touristique au Nord de l’Île). Néanmoins, et bien que la première impression compte pour beaucoup à l’arrivée d’un long vol, normalement, les touristes qu’on espère attirer ne vont pas seulement rester et séjourner dans les halls des aéroports. L’offre pour la destination est déjà peu nombreuse en termes de quantité, et la qualité de service semble aussi désirable si on s’en tient aux colères qui explosent ici et là ces derniers temps. La compagnie aérienne nationale s’est même permise le luxe d’entrer en grève pendant la haute saison touristique, ce qui a entraîné l’annulation d’un très grand nombre de voyages et visites prévus. Fallait il alors s’étonner, comme les autorités en général et le ministre du tourisme en particulier, du recul du nombre de visiteurs cette année? En effet, 300 000 touristes étaient attendus, au mois de septembre, seuls 100 000 touristes sont venus.
Madagascar a de très belles plages avec des eaux turquoises et toutes les nuances de bleu, de très beaux paysages qui ressemblent à s’y méprendre aux canyons américains, et enfin des curiosités dans la faune et la flore dans leurs milieux naturels. Les aires protégées, nombreuses et qui commencent à s’implanter dans plusieurs localités de l’Île sont les théâtres idéaux pour admirer ces bouts de paradis. Néanmoins, une récente décision va peut être se révéler contre-productive. En effet, les prix d’entrée dans les parcs nationaux malgaches ont subi une augmentation assez importante, et comble de l’incompréhension, les prix ont été revu à la hausse, surtout pour les étrangers.
Ce tableau nous donne les tarifs des droits d’entrée dans les aires protégées, et un simple coup d’oeil suffit pour voir qu’il vaut mieux être malgache pour visiter les parcs nationaux. Pour justifier et expliquer cette hausse des tarifs, il a été dit qu’une étude préalable a été réalisée au-près de touristes étrangers qui étaient en visite à Madagascar et que les résultats de cette étude ont montré qu’ils consentaient à payer plus pour y accéder. Les différences de niveau de vie « supposées » entre Malgaches et touristes étrangers ont été aussi mises en exergue : « ils gagnent plus, ils peuvent bien payer plus ». Et enfin, la nécessité pour les parcs nationaux malgaches d’acquérir leur autonomie financière a aussi été prise comme argument dans cette différence de tarification.
Bien que ces explications peuvent en partie justifier cet état des faits, elles ne suffisent pas à convaincre… On se pose la question de savoir si les touristes étrangers consultés ont vraiment su qu’ils allaient payer plus de 30 fois plus le billet par rapport à leur ami malgache qui allait faire la visite avec eux? pour une famille complète de touristes étrangers, Madagascar serait il toujours aussi fascinant si elle ne visitait qu’un seul parc national? (d’autant que de plus en plus de zoos en Europe ou aux Etats-Unis ont des lémuriens!) pour les familles bi-nationales comment cela se passe? on se base sur l’apparence physique ou sur les noms des personnes? (sachant que dans les règles de la nationalité malgache un enfant né d’une mère malgache et d’un père étranger doit en faire la demande, alors qu’il est automatiquement malgache si son père est malgache et la mère étrangère).
L’autonomie financière du réseau des parcs nationaux peut certes être acquise plus rapidement avec les touristes étrangers, mais les locaux sont aussi une réserve intéressante de visiteurs. Est ce qu’il faut toujours attendre l’autre pour nous aider? N’est il pas intéressant de mettre en place une politique pour inciter les Malgaches à visiter et honorer leurs propres parcs nationaux? Ne faut il pas encourager les jeunes cadres dynamiques à promouvoir les richesses naturelles du pays plutôt que de les voir entrer dans une course à celui qui irait cette année en vacances à Maurice, en Afrique du Sud, en Italie, au Canada ou en Thaïlande? Les envies de Disneyland, Parc Astérix devraient rivaliser avec les souhaits de visiter l’Isalo, l’Andringitra ou encore la Baie de Baly….
Un Malgache vaut tout autant que n’importe quel étranger et bien que les nécessités financières imposent une si contestable tarification, il est important d’impliquer chaque Malgache dans la question de la protection de sa richesse en biodiversité. Car en effet, on ne protège bien que ce que l’on connaît. Et qui sait, une visite dans un parc national peut susciter des vocations et responsabiliser sur cette richesse?
Et vous, dans vos pays, les prix d’entrée dans les lieux touristiques ou les lieux sympas à visiter sont ils aussi indexés par rapport à la nationalité des visiteurs?
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